samedi 9 août 2014

Dans le cul, Lulu...

Jour 13
Hou... Mon rêve était étrange et décrivait les errances d'une sorte de type certainement scientifique pris dans une intrigue fantastico-policière dans une sorte d'hôtel danois ou scandinave. Il y avait des règlements de compte en pagaille et mon vieux, il en arrivait même à éliminer certaines personnes sans doute impliquées dans un énorme complot mafieux avant qu'à la fin on ne se rende compte que de manière un peu facile tout était un film et que l'histoire racontait finalement le délire de ce scientifique alcoolo.
Je me souviens même de mes commentaires sur la taille du sexe de ce scientifique quelques semaines après les événements qui apparaît à poil dans une scène où tous les personnages de l'intrigue sont dans leur peau de comédiens et mélangés différemment.
On se demande toujours comment les autres gens rêvent. Les personnages d'un rêve sont généralement des bouts arrangés de notre psyché, mais moi, le plus souvent, je ne suis que spectateur, je suis rarement acteur du rêve, je plonge parfois un peu dans les émotions d'un des personnages mais il est rare que je n'en sois qu'un. Un peu comme le principe sans doute des films du futur où, lorsqu'on pourra enregistrer les émotions des acteurs, on pourra choisir de vivre un film en points de vue multiples, en plongeant de l'un à l'autre des personnages.
Le plus fort dans un rêve, je trouve, c'est même le registre des émotions qui sont, pour mon compte, les plus vraies ou disons pures qu'on puisse ressentir. Il n'y a aucune interprétation des émotions d'un autre, il n'y a que les multiples émois du soi avec lui-même et peut-être, parfois, avec la Source pour ceux qui y croient, le fameux inconscient collectif, la zone étrange de partage et de perception dégagée des frontières de la veille qui peut expliquer certains rêves prémonitoires où le fil linéaire du temps tel que nous le percevons n'a pas forcément cours.
C'est certainement ce que je trouve de plus con dans le statut d'être humain, celui de ne pas pouvoir tirer plus de substances de tous ces rêves.
Bien sûr, certains diront qu'il ne s'agit que du cerveau qui classe, stocke, trie et élimine ou emboîte certaines données de la journée. Mais je n'ai pas cette sensation quand je rêve et l'important c'est ce qui définit ta perception de la réalité, pas forcément la réalité elle-même.
Je ne sais pas si tout n'est qu'illusion, mais si c'était le cas, l'illusion la plus proche du réel que nous sommes, ou de l'illusion de réel, serait quand même nos rêves.
Bon.
Sinon je ne retrouve pas mon manteau.
Avec mon portefeuille dedans et sans doute l'équivalent de 200 euros et deux cartes bleues.
Normalement les gens du Nord sont honnêtes.
Mais le camping étant occupé à 75 % de français, c'est un peu moins sûr.
Nous devons attendre neuf heures, voir si la réception s'ouvre, sinon, j'espère que je ne vais pas gâcher la journée de mes deux camarades d'aventure.
Quand je disais que le rêve était moins compliqué que la vie...

75 % de français au moins, jour 13.
75 % de français et c'est la merde.
Les toilettes et les chiottes sont immondes, la cuisine est dégueulasse et je me fais piquer mon portefeuille avec 200 euros dedans, deux cartes de crédit et tout le bazar.
Sans compter l'attente très longue de l'accueil parce que le gars de l'accueil s'est bourré la gueule la veille avec certaines personnes du campement.
Je n'ai pas été vigilant.
Un oubli de ma veste et des rats français ont sauté dessus.
Français. A 100 %. Je suis définitivement devenu misanthrope avec les pays du Sud : il n'y a pas le sens de l'accueil, de la réception et de l'honnêteté caractéristiques des pays du Nord (évidemment que c'est lié au froid et au fait que le voyageur crevait si tu lui disais merde). Mais quand même.
Remarque, les points positifs dans cette histoire de merde...
Un putain, bien que lent, de bon flic auprès de qui je fais ma déposition. Il s'est bien foutu de ma gueule, mais gentiment, avec l'humour islandais auquel je suis réceptif puisque que je pratique l'autodérision.
Une visite de l'ambassade française de Reykjavik avec un employé qui avait demandé sa nomination et qui a eu du mal à supporter l'hiver mais qui a pris un peu de la couleur locale au niveau de l'humour et de la placidité.
Une excellente happy hour dans un pub appelé « The Lebowski Bar » en hommage au film. L'happy hour, c'est traître. Mais j'avais bien besoin de ça.
Un non pétage de plomb étonnant en dépit de la longue attente le matin, de la matinée totalement gâché et du fait qu'on ait quasiment rien fait à cause de moi. Je n'ai pas ressenti cette sensation de viol que j'avais déjà eue en étant cambriolé ou en me faisant niquer une autre carte bleue.
Comment dire ?
Oui, j'ai perdu 200 euros.
Oui, ça a été galère.
Mais bon.
Avec l'aide des parents de ma femme, on s'en est sorti au niveau des assurances (IM-POS-SI-BLE à appeler depuis l'étranger : RI-DI-CU-LE).
Avec l'aide de ma femme et d'Anne-Laure, empathique sur le coup, je n'ai pas eu à m'en mordre les doigts, car c'est bien un vol, et rien d'autre.
Si ce n'était le théâtre, ça scellerait mon envie définitive de me casser d'un pays où on ne respecte pas certaines valeurs que je considère essentielles.
J'ai retrouvé il y a quelques semaines un sac à main au supermarché, il ne m'est pas venu une seule seconde à l'esprit de piquer la thune.
Là, j'ai eu affaire à un de ces gros enculés qui font que je serais un misanthrope et un désabusé presque intégral si ce n'était que l'art ou l'empathie me sauvent.
Bref.
J'ai un regret, sur hier, avoir emporté une fois ma veste à la cuisine crade et l'avoir oublié un peu.
J'ai une envie, en rédigeant ces lignes, coller une patate au voleur et je sais que je l'aurais fait si je l'avais pris la main dans le sac.
J'ai une certitude, une fois que j'aurai écrit ces lignes, je ne ruminerai pas le vol.
Je crois au destin, aux signes qui te disent : abandonne ta vieille peau, mue.
J'ai donc bien perdu tous les trèfles à quatre feuilles cueillis en Irlande (sauf ceux que j'avais pris pour les autres).
J'ai aussi perdu ma carte de rhésus sanguin que j'avais depuis ma naissance et qui a traversé tous mes portefeuilles.
Les cartes, le permis, la carte vitale, les deux cent euros à la limite... (plus si on considère le rachat d'une nouvelle veste à un tarif relativement islandais).
Qu'apprendre de tout cela ?
Jeter le passé. Repartir à zéro ou du moins sur les bases qui me font envie depuis des mois.
Ça sera théâtre, écriture et puis voilà.
Je ne me raccroche à aucun écho.
Des images de la journée ?
Oh bien sûr.
L'air bonhomme du flic du village situé à 13 kilomètres d'Hella : Hvolsvöllur.
La discussion avec l'employé de l'ambassade qui ne traite que peu les dossiers de vol, plus depuis trois semaines avec l'arrivée des touristes français, alors qu'à Rome c'était monnaie courante.
L'excellente ambiance au bar, détendu par la double bière de l'Happy hour.
La tranquille sérénité qui se dégage de l'appartement où nous résidons, la demeure d'une particulière qui loue son propre appartement, avec son intimité en partie dévoilée. J'ai pu feuilleter un livre de photos érotiques parlant des positions sexuelles (en islandais, mais avec des photos) ou lire un conte traditionnel (en anglais).
Ma femme a définitivement envie de revenir.
Moi, j'ai envie d'éviter les français comme la peste, du moins, les cons, les râleurs, les grandes gueules, les sales ou les hypocrites. Et il y en a vraiment beaucoup, beaucoup, beaucoup en Islande (allez savoir pourquoi). Il y en a aussi des très bien. C'est juste que sur la moyenne, eh ben, on a des leçons graves à prendre du Nord, c'est tout. Et pour éviter les français en vacances, faut bien réfléchir : où vont-ils le moins en masse ?
Non parce que, si je pars, c'est pour causer en anglais aussi. Mais quand la moitié de ton séjour, t'as eu l'occasion de parler français, eh ben, walla quoi. Ça fait pas dépaysement. Changer de langue est une composante essentielle du voyage. Changer de mentalité aussi.
Mais je râle, et de fait, c'est comme toujours.
Un voyage, c'est les pertes, les peines, les gains et les joies et ça te construit en quelques jours bien plus rapidement que plusieurs mois dans ton année si tu as su ouvrir les yeux (et dans mon cas les ouvrir assez pour ne plus croire que les gens sont sympas – ou du moins savoir que si un camping est quasiment uniquement occupé par des français, c'est pas le pays où tu te trouves, mais la France qui règne).
Allez.
Je ne me prends pas la tête plus que ce chemin d'écriture.
Je livre la page du jour, et c'est marre:)
http://www.lapagedujour.net/aout2014/neufaout2014.htm

Et la page du jour, faite une heure avant d'apprendre que je l'avais eu dans l'os.
http://www.lapagedujour.net/aout2014/dixneufaout2014.htm

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