samedi 20 août 2011

Jours 9 à 15

Skye...
Minuit 11, le 15, mais toujours onze heures, le 14 en Écosse.

Je fais quoi ? Je parle des émotions ? Je raconte dans l'ordre ?
Non.
Je laisse les impressions dominer, c'est plus parlant comme ça. Je revois le château de TIORAM ??? sur sa petite butte, un panneau interdit d'entrer à l'intérieur, comme si j'allais me gêner. Un des meilleurs moments de la journée de voir de l'intérieur ce château envahi par les ronces et les mûriers et en train d'être reconstruit depuis un paquet d'années si j'en juge l'écriteau datant de 2000 interdisant l'approche de la face nord du château.
La route, le long de la péninsule d'ARDNAMUCHAN, impossible à prononcer comme nom, bon sang. Magnifique. La route, ensuite, pour rejoindre Mallaig où l'on peut bifurquer pour aller vers le château...
Il y a aussi ce notaire écossais, rencontré à Tobermory en attendant le ferry. Il est amoureux des bonnes choses et de pas mal de choses en France. Sa voiture est une pièce de collection magnifique vieille de 31 ans. Il nous donne un truc pour des croisières en Europe, toujours profiter des mois de Mai ou de Novembre quand les paquebots sont entre leurs saisons Caraïbe et Méditerranée...
Je revois le chien sympa prêt à rentrer dans la voiture alors que la pluie tombe près du phare qui indique quasiment le point le plus à l'Ouest des terres d’Écosse (non île).
Le visage bonhomme du propriétaire de l'auberge de jeunesse d'ici, c'est quelque chose également. Il a une tronche caractéristique avec un large menton et une bonhommie incroyable.
Les quatre allemands qui partagent le petit coin de l'auberge où nous nous trouvons (il y a trois chambres pour deux et une cuisine à part)... je leur offre des crunchies, il est impossible de ne pas goûter à un des plaisirs des cochonneries Cadbury.
Bêtement, il y a aussi le film que je viens de voir, thin knight (ou men) dancing, qui m'a bien tenu la soirée dans la chambre pendant que les allemands jouaient aux cartes.
Le moment le plus drôle de la journée fut cependant l'attente dans une auberge / café / restaurant le matin après avoir débarqué du ferry de Mull. Ma femme n'a pas pu s'empêcher de faire des réflexions sur les grains de café encore collés à la tasse et à l'énorme pot de pisse d'âne qu'on nous a amenés pour deux, sans compter le temps d'attente.
Et puis il y a ce rêve par lequel j'ai commencé ma journée où hors de mon corps je laisse mon aveugle de père pister ma mère qui refuse sa couche... Ma pauvre mère qui boîte sur une voie ferrée et se fait rattraper par le prédateur vicieux et aveugle mais avec un sens de l'odorat très développé.
C'est une fois ma mère morte que j'affronte mon père et sa canne épée et que je le pousse de la falaise.
Y a de quoi réfléchir à de sérieuses interprétations au sujet d'un rêve comme ça, pas vrai ?
A côte de ça, toujours pas de trèfles, ni de loutre, mais un temps somme toute normal je suppose pour un mois d'Août écossais... On a pris pas mal de soleil... Notamment moi, à midi, en descendant seul dans une baie pendant que ma femme dormait.
En touchant des pierres de la vieille maison en ruine qui se situait au bord ouest de la baie, j'ai senti encore des pierres vibrer.
Peut-être que ce voyage est celui de la pierre et de la nature, c'est essentiellement ce que j'ai collecté pour le moment dans ce sac médecine...
Qui sert à quoi d'ailleurs ?
De focus.
De focus pour moi et une manière de percevoir ou de s'ouvrir aux portes de l'invisible.
L'étui dans lequel sont mes dés fétiches et les cheveux de mon père, l'étui dans lequel la boucle d'oreille de mon père avait été mise après son décès s'est brisé aujourd'hui.
Quels signes interpréter ?
Une nouvelle étape ?
Je peux sans peine avouer que me trouvant isolé des habitudes sans doute trop pesantes, il est facile d'avoir envie de se retrouver ici ou au Canada avec d'autres choses à faire.
Rencontrer un notaire, voir des tas de choses à vendre... Il y a de quoi se poser des questions et avoir des envies pas vrai ?
Le sac à mes côtés, les parents tués, je constate aussi que j'ai bu un café dans un endroit que j'avais déjà visité l'année dernière, j'ai passé de même une soirée dans un pub déjà pratiqué et pour la première fois, je passe la nuit dans une auberge déjà visitée... Une boucle qui se ferme peu à peu... Un écossais aime la France, un français aime l’Écosse...
Bien sûr, je n'ai pas vu le pays dans des conditions plus rudes. Mais forcément, ça appelle, ça fait envie. Ma femme me dit que ça ne serait pas une bonne solution d'essayer une semaine l'hiver car les aéroports en France sont si facilement en rade...
A voir. Elle voulait essayer aussi Stockholm en hiver.
Et je pourrais relancer d'un Vancouver ou d'un Québec, tiens... Ou d'une ville écossaise...
Ouais... Comment est cette fichue île de Mull l'hiver ? Comment sont tous les paysages qu'on a traversés aujourd'hui ? Aussi changeants ?
Pluie, soleil, vent, calme, bruine, couleurs, arcs-en-ciel, paysages sans cesse changeants...
C'est normal qu'il y ait tant de français et d'allemands qui viennent à leur saison des vacances...
Il faut vraiment que je découvre les Alpes ou les Pyrénées ou la Corse avant de voir quel pays je préfère.
Non, mieux, il faut vraiment que je puisse continuer à voyager.
Bien que je sais déjà que certaines mystiques m'attirent plus que d'autres.
Mais quelles claques pourrais-je recevoir si je pouvais faire comme ce type interrogé à la BBC ce matin à la radio et qui a passé 35 ans à photographier les cérémonies rituelles à travers le monde. Il a parlé d'une sorte de succédané que les gars du Bangladesh ont pour palier leurs difficultés d'aller à la Mecque. Imaginez 5 millions de personnes qui s'unissent dans un terrain grand comme Hyde Park pour communier dans le silence pendant près de 22 minutes...
Imaginez ça dans n'importe quelle foi.
Imaginez qu'on puisse se débarrasser de tous les oripeaux de l'enrobage pour n'aller qu'à l'essentiel, la communion de l'homme avec l'homme, avec la nature ou l'univers...
Hum... La nature...
Je me passerais bien de ma communion avec les midges ce soir, tiens. Je suis relativement ravagé par les midges. Ça pique et ça gratte. Et pourtant...
Et ben je suis vivant. Plus que jamais, sauf dans les épiphanies parfois en jeu de rôle ou au théâtre.
Joue.
Joue avec tout. L'invisible et l'envie. Le rire et le jeu.
Offre aussi un peu. Ah bon sang, je pourrais presque résumer tout cela en finissant sur l'anecdote suivante... Au p'tit bar où on a attendu une plombe, où je suis allé goûté un bout de beignet laissé par quelqu'un (pour éviter d'avoir à en acheter et savoir si c'était bon), où il y avait une grosse plume d'oiseau sous une des tables, où au comptoir ils avaient encore en dégustation l'ancienne bouteille de Ledaig, dans ce bar, j'ai déboursé 4 livres pour acheter deux Cds qui iront à un fond de lutte contre le cancer... L'un des deux est une merde presque sans nom de refonte des musiques traditionnelles d'ici presque uniquement à l'accordéon. Bien. Mais surtout le deuxième est un album des pogues avec sodomy dans le titre.
J'achète un truc avec sodomie dedans pour aider à lutter contre le cancer.
Ouais.
Et c'est comme ça que je ne veux pas cesser d'être.
J'ai tué le père et laissé tuer la mère handicapée après tout, merde:)

I don't like when boats sink. It makes me poop in my pants.
23 heures 48, le 15 août sur Harris, à Lickisto.

Réveil un peu plus tard que d'habitude... Petites caresses aux poneys élevés par le propriétaire de l'auberge. Ils font partie d'une race très rare, les Eriskay. Tout blanc avec quelques reflets gris ou noir. Plaf, des crins dans le sac de médecine.
La route jusqu'à Portree est sans failles, on la connaît déjà. On prend la peine de découvrir un petit endroit de Portree qu'on avait pas vu avant, du côté de la clinique qui se trouve en haut de la ville.
Je suis particulièrement content de pouvoir retourner dans la petite boutique où j'ai acheté un carnet l'année dernière, celui dont je me sers pour noter mes rêves. J'aime bien le papier blanc, sans carreaux, pour écrire et parfois gribouiller. Paf, je m'en commande 5 ou 6.
Je suis aussi assez ému en retournant dans la « bakery » de Portree... On se prend à essayer tuna et egg mayo rolls avec des scones, des fruit squares et une tarte au pomme qu'on ne mangera du coup que demain matin. Déjeuner sur le parking, en face des poubelles mais avec une belle vue de la baie au fond en essayant de deviner la nationalité des touristes qui passent... C'est qu'il faut voir que les français sont quand même vachement nombreux avec les allemands...
On entend aussi quelques espagnols ou italiens et un peu de néerlandais.
Mais majoritairement, en août, le touriste est français ou allemand ici.
Courses au supermarché de Portree, ça nous remet aussi dans les souvenirs de l'année dernière et la ginger beer est notablement moins chère.
Un peu de glande à Uig, passage obligé à la brasserie du crû et deux ou trois photos de maison pour localiser où pouvait se trouver la maison d'un pnj à Shadowrun... C'est quand même d'Uig qu'est parti un bateau dans lequel il y avait des aventuriers qui ont empêché une sorte de fin du monde dans une de mes campagnes de jeux de rôle actuelle.
Le ferry, shooté par le demi médoc contre le mal de mer, je le passe dans le pâté.
Puis c'est l'installation au camping. Un site très joli, une magnifique « blackhouse » en vieilles pierres pour se replier du fait de l'omniprésence des midges, un temps plus que sympathique également... Trop, les midges sont sacrément de sortie ce soir.
C'est simple, il n'y a pas un pet de vent. Chose rare, je suppose.
Avant de prendre le ferry, tant que je suis chaud et que je me souviens de tout, il y avait à remplir un p'tit formulaire... Je me suis permis d'y laisser dans les recommandations spéciales ce qui fait le titre de ce chapitre.
Ma femme raye un peu la voiture avant de sortir du camping et on se tape la route Est d'Harris.
Magnifique. Une balade jusqu'à la St Clement's Church liée aux clans Mac Leod et Mac Donald... Un petit bijou parfaitement restauré dont on peut visiter aussi la tour. Une grande claque en ce qui me concerne et un p'tit bout de pierre en plus dans le sac médecine.
Je passe un temps dingue, au milieu parfois des midges, dans le cimetière à ressentir l'endroit (presque aussi habité que le centre de l'église) tout en cherchant des trèfles. Que dalle. Puis au moment de repartir, pris d'un acquis de conscience (après tout j'avais la sensation que j'en trouverais à côté de l'entrée – j'ai cru que c'était l'église, mais non, c'était le long du mur d'entrée du cimetière) je vérifie les trèfles sur le côté du mur alors que les midges attaquent en rafale et ô miracle, mes premiers vrais trèfles écossais.
J'espère, pensée magique qui me dit que si je trouve des trèfles ma femme trouvera une loutre, qu'on verra une loutre au cours du séjour. Il y en a une dans la baie d'après ce qu'on dit les propriétaires.
Le soir, un peu de conversation avec un gars du centre de l’Écosse, en vacances avec son fils et dont la mère est originaire de Stornoway, la capitale de Lewis. Il m'informe que la spécialité de la ville est le black pudding. Bien. On en essaiera donc.
Là, je meurs d'envie de retourner voir la lune, de me balader dans le joli jardin, voire de marcher dans la nuit près des rochers.
Mais ma jambe et les midges disent non. Et le sommeil nécessaire aussi. Demain, on se lève tôt pour aller voir les alignements de pierres hors des flux de touristes et profiter de la capitale à l'heure de midi.
Je suis tout seul dans la maison en pierre, avec pour seules compagnes des petites suceuses de sang qui m'ont laissé des dizaines de traces sur tout le corps.
Et si je devais retenir que trois images de la journée, je dirais : St Clement's church, les poneys et le petit café de Uig, à côté de la brasserie, ou de jolies poteries pouvaient être peintes par des enfants...
J'ai aussi l'image d'un des trois gars d'un groupe de six d'anglais. J'aime bien sa tête mais il lui manque l'avant bras droit... J'ai pas pu m'empêcher de me demander comment il avait perdu l'avant bras et de songer à quel point la technologie du futur devrait exister maintenant.
Dans ce monde, où des aventuriers ont sauvé la terre d'une invasion, eh bien ce n'est pas un problème de perdre un membre. C'est dommage que les prototypes de bras mécaniques activés par la pensée ou ce qui reste de muscle n'en soient qu'à ce stade là justement.
Houuu, je baille.
Le sommeil me gagne malgré le feu que je ressens pourtant à de nombreux endroits de ma peau. Demain, sera je l'espère aussi beau qu'aujourd'hui...

Du Sud au Nord...
23 heures 24, le 16...

Lever tôt, très tôt avec les rêves mangés... La pluie tombe sur la tente, le son est amplifié, impossible de se rendormir... Rêves mangés, bon sang, j'aime pas ça, mais des images et des impressions restent au réveil qui sont malgré tout notées dans le carnet de rêves...
Nous filons en direction de Lewis, vers Calanish / Calanais (Calanaigh pour moi), l'alignement de pierres qui constitue un des phares de la visite de Lewis.
Au début, je suis un peu déçu, l'endroit n'est pas aussi empreint que les sites des Orcades en dépit de leur ancienneté et de plusieurs périodes d'utilisation... Puis, je me dis que ce site est comme une porte dont on doit trouver la clé, une serrure qu'il faut apprendre à ouvrir et je décide de me recharger un peu sur place. Après avoir visionné les photos du site, nous nous sommes rendus compte à quel point certaines choses étaient invisibles dedans, les jeux des ombres et de la lumière dessinant de nombreuses formes, une magie de l'imaginaire à tout va... Des anges, des fées, des visages apparaissent alors... Des pierres chargées de toutes les croyances qu'on veut bien y mettre...
Le deuxième site de Calanish se situe dans le champ d'un paysan, il est plus petit, un peu comme son plus grand frère, verrouillé... Et surtout habité par un taureau à poils longs un peu énervé, ma femme doit l'esquiver et me hurle de faire attention. Je regarde le bestiau qui avance vite vers moi et suis gêné par le fait qu'il y a une gamine de 13 – 14 ans sur le site avec moi. Je passe une barrière pour me retrouver nez à nez avec le taureau qui tente un p'tit coup de corne quand j'essaie de le caresser. Ah le bougre, je tente de l'attirer pour qu'il ne voit pas la gamine, mais celle-ci presque sans s'en rendre compte fait un bruit qui fait fuir la bête, toute la scène se déroulant sous les yeux de ma femme et des parents de la gamine...
Le brave taureau se mettra un peu plus tard sur la route d'autres touristes mais sans la volonté de charger et on le retrouvera encore plus tard à attendre l'herbe coupée que lui donne le fermier qui vient de tondre de l'herbe.
Le troisième site de Calanish est recouvert de merdes, de grosses bouses de vaches, et vas-y qu'on s'assoit sur le respect qu'on doit aux anciens...
Bref, la route étant longue, les choses à voir étant nombreuses, on file sur Stornoway pour... euuuh, pour découvrir un peu la capitale des Hébrides extérieures. 8000 habitants sur les 19000 que comptent Lewis et Harris.
Hum, comment dire ?
Ma femme est déçue par le fait que la ville ne soit pas jolie, jolie mais assez souvent austère... Le temps est pourri et comble de la bizarrerie, on se retrouve quand même à devoir lutter contre quelques midges, choses pourtant rares en ville. Le déjeuner se fait dans un restaurant thaï, tenue par une thaï, justement, qui a épousé un écossais.
Je me réserve en végétarien le midi sachant que je veux acheter du black pudding sur les bons conseils d'un écossais rencontré la veille dans la maison qui nous sert de refuge au camping.
Hum... Je n'ai pas la même opinion que ma femme. On a pas fait toute la ville et il nous faut tenir compte de la très forte présence religieuse. Bref, je trouve mon black pudding (une tuerie au demeurant au niveau du goût) et je m'achète une trousse pour mes dés en Harris Tweed ainsi qu'un petit dictionnaire français (si si si) gaélique chez un antiquaire / vendeur de laines très typique mais sympa...
Il reste cependant l'expérience du café, dégueulasse.
Et celle d'un chat derrière une fenêtre, magnifique.
Le menu du restaurant pour nous deux ? Beignets de crabes et Nouilles de riz sautées aux crevettes avec cacahuètes, choux et carottes pour ma femme... Beignets de maïs et riz avec légumes sautés pour moi et une petite métisse, y a pas à chier, ça fait des beaux enfants, qui joue un peu à la serveuse avec nous.
Coup de barre, mais la route est morne et assez plate, je dors le temps du trajet jusqu'à Point of Ness où nous enfilons l'équipement de guerre contre la pluie afin de marcher un peu le long des falaises. On fait ensuite très brièvement le petit port de Ness avant de se rendre compte que l'heure est finalement bien avancée et de rentrer.
Le soleil se lève lors du retour, enfin et quelques images magnifiques de la chaîne de montagnes séparant Lewis d'Harris nous donnent l'occasion de colorer un peu les souvenirs de cette journée fortement empreinte de la pluie.
La nuit, on la laisse doucement couler sur le camping où, comme hier soir du fait des midges, on s'isole dans le cabanon commun qui permet au campeur de lire, manger, se rencontrer, voire jouer ensemble...
Je passe les intéressants moments de grosses rigolades liés aux aventures de nos intestins, en particulier à Stornoway où ma femme trouve qu'on s'est particulièrement fait chier. Ha ha ha ha...
Plusieurs images d'animaux à conserver de la journée ?
La limace quasi translucide sur une des pierres de cairn de Calanish.
Le mouton caché dans l'abri bus.
Les deux chats derrière leur vitre à Stornoway.
Le taureau nous fonçant dessus...
Le troupeau de béliers à Point of Ness, mais maman, pourquoi sont-ils aussi si sévèrement burnés ?
Ça m'a fait penser à une idée pour des animaux totem dans un jeu...
Ok, vous choisissez l'animal totem que vous voulez mais le sexe de votre personnage sera en rapport avec celui de votre totem question taille... Qui veut être shaman chat ?
Hum...
Et combien alors on aurait de shamans chevaux ou moutons hein ?
Je demande, pour finir, à ma femme ce qu'elle a pensé de Lewis, ce qu'elle en retient : monotone à conduire, une pierre en forme de chat à Calanish 2, les chats derrière les vitres, la bouffe thaï, les falaises, au nord, bien paumés.
Ce qui me permet de penser à une dernière histoire, celle d'un phare, en 1900, où les trois occupants ont disparu un beau jour, on ne sait comment. Une histoire à creuser, n'est-ce pas pour un scénario voyage dans le temps...

Une journée entre soleil et vent...
8 heures 09, le 16...

Ça fait un peu rager que les vacances passent si vite.
Je n'ai pas noté tout mon rêve de cette nuit sur mon carnet et je me souviens d'une scène où des gens à la queue leu leu (en double queue leu leu à vrai dire) arrive en haut d'un escalier et où on leur désigne un partenaire sexuel. Un homme est assez dérangé qu'on lui demande d'aller avec un autre homme qui attend là-haut et préfère laisser la place à un autre homme, pas forcément arrangé...
Un des types entre celui qui attend ou un des deux de la queue n'a pas trop de restrictions en ce qui concerne le choix d'un partenaire... Un peu plus tard, sur un bateau, en tant que capitaine de la plus ou moins bande de super héros que je dois former, je traverse le couloir, vois des cabines dont une où se trouve le non regardant qui tente de violer un autre homme. Le capitaine fait rapidement justice sur le violeur.
J'étais une sorte d'individus armé d'un grand pouvoir de régénération. Je me souviens aussi d'une bataille avec une sorte de double féminin dans un marais gadouilleux... Il s'agit relativement d'une constante dans mes rêves, une aspiration à plus de pouvoir sur soi et de contrôle aussi ainsi qu'à une meilleure place, sans doute, dans la vie sociale par le fait d'être facilement quelqu'un avec un don... Il est possible que je sois influencé par la mystique du lieu et ma mystique personnelle ici... La lune est en effet quelque chose de très important dans les anciens cultes... Et puis il y a à considérer la manière dont ma mystique personnelle croit s'être rechargée au niveau des pierres.
Une pensée stupide qu'ont parfois certains rôlistes m'a fait me dire : hé, si j'avais un alignement comme à Donjons et Dragons en fait je serais sans doute neutre bon...
Allez, il est temps d'aller balader.

22 heures 25...
Et quelle balade...
Le matin, pas de complications, nous sommes allés jusqu'à une magnifique plage avec des dunes de sable située sur  Lyken... Le soleil, le soleil toujours avec nous... Nous fûmes mouillés par les hautes herbes chargées de gouttes dans les dunes, nous fûmes fascinés par les zones de sable pur, ne comprenant pas pourquoi en certains endroits ne poussait pas d'herbe dessus... Il y avait un parfum des dunes de Durness l'année dernière, sauf que cette fois-ci, en dépit d'une légère crampe au mollet, ma femme m'accompagnait. Les noms des défunts lorsque nous avons longé le cimetière étaient un peu tous les mêmes... Morrison, Macdonald, Macleod et j'en oublie...
Le reste de la matinée a consisté à suivre la côte ouest d'Harris pour bien nous rendre compte qu'elle est autrement plus belle que Lewis. Une deuxième plage, près d'un camping semblait moins intéressante alors qu'une balade, sur un chemin au milieu d'un champ chargé de fleurs, apparaissait très prometteur. C'est avec aussi un certain regret que j'ai résisté à l'envie de retourner dans St Clement qui était quand même sacrément quelque chose.
Midi, on s'embête pas (comme moi qui largue le passé simple pour repasser au présent), on déjeune ici, dans le bothy... Je me charge lourdement de finir le Stilton ouvert depuis longtemps et mal, je crois, m'en prendra dans l'après-midi...
Petite sieste, discussion avec une dame qui aide nos hôtes et en route vers le Skoon Art Cafe, un petit établissement sympathique perdu sur les routes d'ici. Je sens que le café ne passera pas bien...
Et effectivement, ça commence à être un peu difficile(chocolat aux marshmallows).
Nous nous arrêtons à Tarbert où j'achète les quatre formes de pudding (white or black) que produit le boucher local qui fait aussi magasin d'alimentation. Petit moment de grâce en voyant dans une si petite ville, deux personnes en uniforme – un curé et peut-être un garagiste – discuter entre eux.
Bref, nous faisons route vers Huisinis où la route est marquée par des paysages somptueux, des vaches, des moutons, un arrêt vomi tout le déjeuner en préventif parce que je sens que je vais être malade pis qu'un chien sinon, une balade sur la plage de Huisinis, pieds dans l'eau.
Une balade où j'essaie de me soigner, fondu finalement aux quatre éléments de la journée : le vent qui souffle légèrement, l'eau jusqu'aux mollets, le sable sous les pied et le soleil qui nous éblouit presque et menace quasiment d'un coup de soleil.
Une petite balade pour prendre l'air nous amène à découvrir l'autre côté de la plage qui donne sur l'île de Scarp. Jamais vu autant de lapins de ma vie qui couraient sur le « machir », la bande végétale qui surmonte les dunes, un véritable écosystème perclus de terriers, de plantes rases et de fleurs (ainsi que de moutons et leur déjections).
Le retour est tout aussi bien, mieux pour moi, moins malade. Il y a un truc assez fascinant sur cette route, en plus de tous les aspects incroyables du paysage, c'est le château devant lequel on passe, comme si on pénétrait dans une propriété privée...
Le soir, remis, je teste tous les puddings avec des pommes et oignons cuits et c'est une véritable tuerie... Je crois que j'ai mangé ce soir un des trucs que j'ai jamais préféré manger de ma vie et tant pis si ce n'est pas végétarien, c'était vraiment une incroyable expérience. Si les anglais ou les écossais appellent leur boudin blanc ou noir « pudding », c'est qu'il n'a pas la même texture que le nôtre et qu'il inclut de la mie de pain, ou comme ce que j'ai mangé ce soir, de l'avoine (et des fruits secs pour un des boudins blancs).
Encore un plat du pauvre et de récupération, comme le haggis...
Une philosophie de ne rien jeter, de ne rien gaspiller qui a sans doute valu aux écossais leur réputation d'avare alors qu'il ne s'agit que de faire au mieux avec tout ce qu'on a.
Et quand je regarde ce que je mange de non végétarien, c'est évidemment bizarrement ça que je préfère... Ces choses que le commun des mortels ne veut généralement pas.
Enfin bref, si je devais retenir un moment de la journée, c'est bien moi à essayer de me soigner et à réaliser soudainement que j'étais au milieu des quatre éléments aujourd'hui et qu'il y avait matière à se ressourcer autant dans ces conditions par soi-même qu'au milieu d'un cairn ou d'une église empreinte.
Si je devais retenir une seule image, ça serait quasiment impossible, mais je finirai sur la petite déception qu'on a eue aujourd'hui à quelques kilomètres du camping quand on a cru voir des loutres et qu'on s'est arrêté sur une « passing place » pour se rendre compte que ce qu'on avait à observer était une colonie de phoques essayant de se dorer à ce qui restait de soleil.
Demain, St Kilda. Ma femme est en train de préparer toutes les affaires, des gosses piaillent dans la douche à côté, un couple de je ne sais pas quoi – peut-être mix néerlandais et anglais ou gaéliques, finit de lire des trucs en face de moi...
La nuit sera un peu moins claire.
J'espère juste que je n'ai pas paumé mon couteau fétiche, celui acheté au Canada que je croyais avoir laissé quelque part dans la tente et que je ne retrouve pas...

St Kilda
23 heures 25, le 18 (déjà – grumf)

Lever tôt. Pas de loutres mais encore des phoques sur le chemin. Je prends une pilule contre le mal de mer. Ma femme, elle était déjà patraque sur la route sinueuse menant à l'embarcadère. J'ai dû m'arrêter pour la laisser conduire.
Départ du petit bateau. Un capitaine de la quarantaine et un jeune de la fin vingtaine constituent l'équipage.
Je n'ai pris le médicament qu'une demi-heure avant d'embarquer, je me force à rester à l'arrière et à observer les îles s'éloigner peu à peu, ainsi qu'à me rendre compte qu'il y a aussi un aspect psychologique dans le mal de mer. Plus les îles s'éloignaient à l'horizon, plus on arrivait au point où sur ma droite il n'y avait plus la moindre langue de terre, plus une sorte de sourde angoisse montait...
Plus la fatigue aussi, l'effet du médicament commençant à se faire ressentir. Je n'avais que deux choix pour ne pas gerber : rester dehors avec les yeux qui commençaient à se fermer ou aller dormir. Le médicament m'a bien aidé à choisir, je suis tombé comme une seiche... pour n'être réveillé vaguement à un moment par ma femme qui dégueulait en dépit de ses deux médicaments... Dans un demi-sommeil comateux, j'ai voulu lui prendre la main, mais elle tenait un mouchoir plein de vomi et s'est plutôt chargée de me repousser pour se contenter d'entrecouper des périodes d'une demi-heure de sommeil par une petite gerbouse des familles.
On arrive à St Kilda, obligés de débarquer en canot à moteur. Rapide tour du village, trop rapide, mais je voulais voir l'ancien village et puis grimper sur le plus haut sommet.
Et là, que dire... je ne suis pas un gars qui va se dire, allez, je retrousse mes manches et je décris le moindre brin de mousse, morceau de falaise ou coup de vent.
Non, je vais simplement dire les choses suivantes : on a loupé les deux trucs que font les plus les touristes – la mistress stone et la visite approfondie du village, on a loupé sans doute le site de la maison des fées qui a fait quand même l'objet de mon scénario final d'une campagne...
Mais on en a pris plein la gueule niveau beauté, grandeur, soleil, impression de remonter dans le temps, se mettre à la place des habitants...
Oui, et même ma femme qui en temps normal sur d'autres sites se serait arrêtée, elle a continué. On ne nomme pas son chat Kilda sans faire un effort une fois qu'on est sur place.
Une des plus belles journées de l'été. A un moment, j'étais en tee-shirt à me balader attachées autour de moi les trois vestes prévues pour le voyage en cas que le temps change vite. Mais non, il n'a pas changé, à peine trois ou quatre gouttes à un moment et c'est tout.
En repartant, il faisait tellement beau et chaud qu'on a vu des militaires torses nus prêts à se jeter dans l'eau (car à marée basse il y a une petite plage de sable blanc). Je leur ai demandé la température de l'eau : ils m'ont répondu « cold » et ils ont plongé.
Le retour s'est fait en visitant en bateau, après une petite collation café / pain d'épice offerte à bord du bateau, l'île de Boreray, le stac an Armin et le stac Lee...
Absolue majesté des rochers et totale féérie du vol des oiseaux par centaines au-dessus de nous.
Bon, il y a ma femme, une passager et le capitaine qui se sont mangés des éclats de guano, mais je me demande comment on a pas été plus à être touché et je dois avouer avoir fait confiance à ma petite voix qui me disait l'un de nous va se faire chier dessus et avoir pris la précaution de redemander mon bonnet à ma femme de peur que de la merde tombe dessus.
Pas de baleines sur le retour, mais sans doute, donc, tous les oiseaux de l'île observés.
Puis fuite éperdue dans les bras de Morphée, grands ouverts par la pilule et demie contre le mal de mer qui me décalque grave la gueule.
Retour ensuite avec un arrêt à St Clément que je ne peux pas m'empêcher de voir comme « habitée »... Il y a une forte présence dans cette petite église, bon sang.
Le soir, beaucoup, beaucoup d'enfants dans le bothy.
Des arrivés tard. On a donc pas la tranquillité escomptée et on finit un bout de la soirée en discutant avec un couple de hollandais qui ont l'habitude de voyager beaucoup, beaucoup, beaucoup et à qui on confirme que les 12 heures de voyage pour St Kilda, c'est pas forcément pour les enfants.
Je rejoins ma femme pour regarder les 300 et quelques photos faites aujourd'hui...

Skye
19 Août 2011

Allez, on est sur le ferry pour aller à Skye, j'ai eu une connexion internet vraiment pas longtemps, bougre, paumée maintenant...
Et la réflexion que je me fais en voyant Harris s'éloigner et Skye se rapprocher, c'est tout simplement : y a que la nature comme chose vraie pour totalement exister en plus de ses passions premières.
Ouais, le rêve serait d'habiter près de la nature tout en ayant l'occasion de pouvoir pratiquer ses loisirs favoris.
Je regarde mes mains mangées par les midges, j'ai envie de me gratter le visage un peu mangé par le vent et le soleil et pas mal par les midges aussi.
Et je pense bêtement à rien ensuite à part la nécessité éprouvée par ma femme et moi-même d'aller ailleurs au moins un mois dans l'année.
En ce qui concerne les nouvelles du continent, je sais que mon chat est trop gros, j'ai eu à peine le temps de répondre à un copain de jeu on line et zoup... La tête dans le cul, perdu entre les deux îles, dans la douceur tranquille d'une matinée ensoleillée, je ne peux pas m'empêcher de penser qu'il faudrait qu'on teste un des pays qu'on a bien aimé, mais l'hiver, histoire de savoir si ça vaudrait le coup d'y vivre. Je rends l'antenne pour fermer un peu les yeux... La nuit fut courte, malgré de gros dodos dans la journée hier.

Boum, dans le petit réduit du très sympathique fermier...
Blam, le voilà qui toque à la porte du réduit. Gros brin de causette, il s'inquiète du vent qui pourrait se lever et nous dit où nous réfugier éventuellement.
Je lui parle des pays où on a préféré la nature et les habitants : le Canada et l'Ecosse. On a aussi pas mal parlé du voyage à St Kilda l'après-midi qui nous a laissé d'ailleurs un peu sur les rotules aujourd'hui. J'ai perdu également un peu de temps avant de lancer la rédaction de l'écrit du jour parce que tout simplement le fermier m'a donné accès à sa connexion internet et que j'ai envoyé un mail ou deux à qui de droit.
Mais bref, si je dois résumer la journée, c'est essentiellement :
Ferry, et pâté mélangé d'un peu de zombie.
Magasins fermés à Uig, hum, pas d'achat possible.
Petite balade près du château de Dunvegan pour voir de magnifiques îles. Le nom m'échappe, je n'ai pas de carte sous les yeux mais je reviendrais sur ce fichu blog dans quelques jours. C'est juste histoire de noter les premières impressions et d'avoir un terreau pour refaire la même chose que l'année dernière en pages du jour.
Ce qui nous a bien marqué lors de la petite balade le long de la plage et des dunes, ce sont les gens se baladant en tee-shirt alors qu'on était avec deux polaires et une veste contre la pluie. J'ai aussi failli pisser sur des gens situés à un mètre sous moi.
La fatigue se faisant de plus en plus sentir, on est allés jusqu'au petit bled de Stein (et quand je dis petit, c'est petit) pour que ma femme puisse goûter leur fameux sandwich au crabe qui est une tuerie. Et même moi qui n'aime pas particulièrement les produits de la mer, je peux affirmer qu'on était là dans le top du top, mieux sans doute que mes toasties au haggis mariné à la bière (ouais, j'ai pas peur) ou ma soupe brocolis-stilton.
Ce qui a peut-être un peu assommé la journée, c'est qu'en plus de la pinte de ale pression, je me suis laissé aller à l'immense plaisir de goûter mon whisky préféré mais version 15 ans d'âge.
Fatigue, fatigue, pas un coup dans le nez, mais pas non plus frais, on a fait la route vers Portree ensuite pour quelques courses, encore une petite découverte de la ville et se poser dans un autre pub (la pluie n'a pas aidé à vouloir nous faire galoper, vent, froid rajoutés à la fatigue, on a décidé d'une après-midi à faire les merdes)...
Dans ce pub, un truc familial, j'ai goûté à la pression locale, faite spécialement pour le dit pub et à un single malt que je ne connaissais pas, le Jura, histoire de savoir si ça vaut le coup de l'acheter en bouteille. L’Écosse est vraiment bien pour faire son choix en achetant soit un verre au bar, soit des petits échantillons.
Puis, eh ben, bêtement on est rentré... content de trouver dans le petit abri tous les légumes qu'on avait commandé au fermier ainsi que les fameux de poule qui nous avaient tant plus la dernière fois...
Une soirée à la ferme, donc... A apprendre encore un truc con que je ne savais pas : il ne faut pas faire bouillir des œufs trop frais, la peau ne se détache pas. On s'en foutait, on les mangeait « soft boiled, limite coque » mais sinon, eh bien il vaut mieux réserver les œufs frais pour le plat ou pour les mayonnaises, quoi.
Rha.
J'aime vraiment cet endroit...
Je donnerai l'adresse un peu plus tard. Le gars est vraiment extrêmement sympathique et c'est quelqu'un de vrai, proche de la nature, et seulement adepte des produits naturels pour faire sa production. Je lui souhaite de pouvoir un jour aller sur St Kilda.
Je rends l'antenne pour l'instant en essayant de repenser à quelques images fortes de la journée :
- la dame forte en débardeur qu'on croise sur le chemin et retrouve des kilomètres plus loin dans un bar.
- mon rire au deuxième pub qui aurait pu me donner l'occasion de sérieusement sympathiser avec les gars du crû si on était resté.
- l'achat d'un petit guide sur les randonnées possibles à faire dans les environs qui va se révéler essentiel dans les prochains jours.
- La sympathie et la bonhomie du fermier qui m'a rappelé que j'avais apprécié de le voir lui et son fils l'année dernière et qui ne cesse de me convaincre que c'est plus un truc comme ça que ma femme devrait faire. J'ai l'impression qu'elle rêverait bien d'un concept entre la ferme et le camping / bed and breakfast... si possible dans un autre pays que la France...
- Les poules de ce brave fermier qui nous avaient tant plus l'année dernière.

Allez. Au dodo. Et tant pis pour les fautes pour l'instant...

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire