Jour
11...
Pour
tout dire, mon gars, une rude journée avec une nuit entrecoupée de
nombreux réveils. Ah ça. C'est pas tant le nombre de kilomètres
faits dans l'absolu (quoique...) que la vitesse qu'il fallait pour
les faire.
La
distance importait un peu aussi... Tant d'endroits traversés et si
peu d'arrêts finalement, et pas de vraies longues balades dans la
forêt.
Snowdonia
qui s'est offert à nous ce matin sur la route est vraiment
splendide, même sous la pluie du début de matinée. On va dire que
deux choses ne remplaceront jamais l’Écosse : les places de
parkings finalement bien chères car il faut payer partout et le fait
que finalement tu ne te sentes pas totalement dans la nature sauvage,
comme si elle était un peu domestiquée au gré des villages ou bas
côtés.
J'ai
légèrement les poils de l'anus rentrés encore à l'intérieur du
fondement pour le prix de la cascade (4 livres 50 pences) assez
minable au regard de toutes celles qu'on a déjà vues qu'on a payé
ce matin...
Et
je dois avouer que j'ai peu apprécié le fait d'avoir à raquer
chaque parking, n'importe où. Comme je suis un geek indécrottable
de mon jeu de rôle favori, on s'est arrêtés le midi dans un
village du nom de Harlech (un grand dragon dans l'univers de
Shadowrun avec une orthographe différente) et on a fait de l'essence
dans une station service appelée Dragon. Nous n'avons pas visité le
château, ni payé les 3 livres obligatoires pour se parquer et aller
à la plage. Non, nous avons bêtement mangé dans la voiture, un peu
marris du « paye, paye, paye, ton écot mon brave »...
Enfin
bref, esprit de l'aventure, si nous avions eu le temps... à
Betws-y-Coed, le village où apparemment les marchands sont aimables
plus ils ont de touristes, nous aurions fait une marche de 8 miles
qui nous aurait menés dans des collines et des forêts.
Et
si nous avions pu, nous aurions pris plus qu'une heure à Dolgellau,
ville jumelée avec Guérande, où vit la sœur de ma femme, pour
profiter un peu plus du village.
Nous
aurions aussi fait une marche de 6 heures (donc de 10 pour nous) qui
nous aurait permis de voir le sommet de plein de montagnes après
avoir payé 10 livres de parking pour la journée (hurg) en étant
arrivés tôt parce que les places sont pitins de chères.
On
se serait arrêtés aussi dans des tas d'endroits charmants avec vue
sur des lacs ou possibilités de grimper dans les monts et montagnes,
toujours en payant plusieurs livres (5 pour 4 heures et 10 pour la
journée en général).
Je
me rappelle, esprit de l'aventure, sans doute un peu fatigué par le
fait de devoir tenir la route, m'être dit : pitin, à ce tarif
là, c'est la dernière fois qu'on me voit au Pays de Galles. Puis,
plus loin, je me suis dit qu'en fait on a vu gros. C'est bien deux
semaines qu'il faudrait consacrer uniquement au Nord du pays de
Galles.
Nous
logeons actuellement dans une ferme sise non loin de la ville de
NewCastle Hemlyn, et je regrette de ne pas pouvoir visiter
l'exploitation de 160 vaches, 120 moutons et 6 cochons. La fermière
fut plus que sympathique et agréable et nous sommes tombés le jour
de ramassage du foin pour l'hiver, une opération harassante qui doit
se faire dans la journée.
Fait
étrange, un oiseau a cogné la vitre de la cuisine pendant que nous
mangions. Ma femme l'a pris dans sa main et l'a posé au sol. Elle
n'était pas sûr qu'il s'en sorte. Mais ce fut le cas. Ceci dit en
parlant de l'accident à la fermière, nous avons trouvé un autre
oiseau mort. Deux oiseaux se sont donc pris la même vitre
aujourd'hui. Un oiseau qui se plombe la gueule sur une fenêtre est
un signe de mauvaise augure dans certaines cultures, mais moi je vois
le fait que ma femme a touché celui qui a survécu.
Pourquoi ?
Pourquoi
deux oiseaux au même endroit, aujourd'hui ?
T'as
une idée ?
Y
a un signe et un sens ?
Même
en goûtant pour la première fois du whisky du crû, le Penderyn, en
version finie en fût de madère, je n'ai pas d'idée mon pauvre
vieux. Je ne peux laisser que trois mots couler : vie, destin,
écho.
T'es
pas mort, t'es blessé, tu peux continuer grâce à ta femme où à
ceux qui t'aident.
Trois
images de la journée ?
Je
veux effacer celle de l'oiseau mort.
Je
vais prendre la sympathie de la jeune fermière qui nous a accueilli.
Vraiment, chaud au cœur.
Je
prends aussi le bête déjeuner dans la bagnole, face au château
Harlech avec les dunes dans le dos en sachant qu'on aura le temps de
rien faire.
Et
puis, pour finir, peut-être tout simplement ce petit écureuil gris
aperçu lors de la balade à Betws-y-Coed ou l'oiseau qui attendait
de pouvoir pécho un poisson, installé sur un rocher au milieu de
l'eau, toujours lors de la même balade.
Bien
sûr que je devrais parler des magnifiques paysages aperçus au cours
de la route. Mais justement, c'est ça : aperçus, survolés.
Ouais,
de la forêt, des lacs, des montagnes, de la légende arthurienne.
Mais pas le temps...
Des
regrets ?
Nan,
on ne va pas en avoir. C'est bien d'avoir fait cela, même si c'était
trop rapide. Ça nous a donné un premier aperçu des possibilités
galloises (avoir l’Écosse en plus chaud, et plus près de la
civilisation).
De
retour de la douche...
Eh,
j'ai pensé... Pourquoi seulement trois images ?
Je
t'en donne d'autres, juste comme ça, parce que.
L'église
de Dolgellau qui fait crèche, où j'achète pour un prix ridicule un
livre rigolo sur la crise de la quarantaine (que je commence à me
taper) et où une femme refuse le trèfle (rare, dans les cimetières,
j'en trouve rarement) le trèfle à quatre feuilles que je lui offre.
Les
monts de Snowdonia, allez, parce qu'ils envoient la patate, quand
même.
L'incroyable
lenteur de la circulation en pays de Galles.
La
bouteille de Penderyn, à côté de moi.
Moi,
qui n'ose pas regarder l'oiseau blessé mais qui sent que ça ira
bien, et le drame quand j'en trouve un mort avec la fermière,
j'appelle vite ma femme pour constater que ce n'est pas le même
oiseau.
Les
chiens partout, surtout des border collies, si j'ai un autre chien un
jour, ça sera cette marque.
Les
nombreuses choses seulement aperçues, parfois même pas
photographiées et qui vont s'estomper dans la mémoire, en
particulier un lac éclairé par un rayon de soleil perçant les
nuages ou les forêts dans lesquelles nous n'avons pas eu le temps de
mettre les pieds.
Mais
finalement tant pis si nous avons roulé une heure de plus que prévu
(une location s'étant annulée la semaine dernière) et si nous
avons abouti ici en ce jour le plus industrieux de l'année pour eux
(d'où la raison pour laquelle ils n'ont même pas encore mangé à
près de dix heures du soir).
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