Orage...
Il pleut, il tonne...
Un orage vient de s'inviter au-dessus
du ciel d'Evry-Gregy
J'ai presque envie de regarder toutes
mes vacances et d'essayer de voir ce qui m'a le plus transporté.
Corrimony, le cercle de pierres près
de Cookstown, la chaussée des géants, la rencontre avec Eric
Gregory, la discussion dans l'avion au retour avec un certain Joe,
diminutif de Joseph.
J'ai bien aimé Joe. Vraiment. Je
regrette de ne pas lui avoir demandé son adresse email. Mais il ne
faut pas oublier que les anglosaxons ont le contact très facile,
mais qu'ils ne cherchent pas forcément à maintenir des liens.
Joe était place 13 B, ma femme 13 C et
moi, 13 A, on lui a demandé s'il préférait la fenêtre ou le
couloir. Je n'aime pas trop les fenêtres a-t-il fait.
Tu n'aimes pas trop les fenêtes ?
Hu ? C'est donc que tu as un peu peur de l'avion, non ?
Du coup, comme moi aussi, j'ai peur,
j'ai parlé avec lui, tout le long du vol.
Il a retrouvé un amour d'adolescence
d'il y a 32 ans voici un an. Une française qui l'a recontacté après
qu'ils se soient séparés, aient eu un mariage chacun et un divorce.
Il partait la rejoindre jusqu'à lundi avant de passer 11 jours en
Slovénie.
Joe, il a travaillé comme ingénieur
et il a deux endroits qu'il adore par dessus tout au niveau des
paysages, un coin du Nord de l'Italie et une île de Grèce.
Il a été 6 mois en Italie et aussi en
Corée, quand il était plus jeune. Il est fan de festivals et de
concerts, il en a vu plus de 500. Il m'a parlé de la brasserie
locale de Belfast : Hilden.
Et j'en passe : le fils de son
amie d'enfance qui vient quelques jours bosser avec lui dans son
entreprise spécialisé dans le traitement de l'eau, la manière dont
les coréens boivent de la bière (chacun sert quelqu'un d'autre), sa
fille qui s'endort sur son bras après avoir dit je n'aime pas trop
l'avion, un atterrissage difficile en Corée avec des ailes qui
touchent le tarmac, son amie d'adolescence qui a vécu à New York et
à Londres ce qui facilite grandement le rapport entre eux...
Je pourrais aussi parler du vendeur du
magasin de liqueurs et d'alcools de l'aéroport de Belfast, je lui
achète deux bouteilles de single malt irlandais et il me parle d'un
excellent blend d'une nouvelle maison qui vient de se monter, il me
donne même l'adresse du site où il commande son whisky, ils n'ont
pas mis une blonde juste là pour vendre mais un mec qui s'y connaît
et avec lequel on peut se connecter.
Je pourrais aussi causer de la dame du
B&B ce matin, 35 ans, un physique d'une actrice que j'ai vu dans
une série télé, un peu desperate housewife, éminemment
sympathique et attentionnée qui nous fait un petit déjeuner d'enfer
et nous prête un pèse-dinde (si si si, ça existe) pour peser nos
bagages.
Je pourrais causer de l'émotion en
voyant dans le cimetière près de la vieille croix celtique située
à Ardboe l'image d'un jeune gars qui aurait eu mon âge et qui est
décédé d'un accident de canoë à l'âge de 23 ans.
Il y a la pointe de regret de n'être
pas retourné au cercle de pierres d'hier, bon sang.
Je mets le lien :
Il ne tonne plus. Il pleut sans doute
toujours.
Ma femme est contente d'avoir retrouvé
sa Kilda. Horus est content d'avoir retrouvé mon pied pour se
frotter dessus. La chienne a fait un peu la fête après avoir mis un
instant à capter qu'on était revenus.
Et les vacances sont déjà derrière
nous. Moins derrière moi que les autres années puisque j'ai les
pages du jour à faire sur plusieurs semaines, mais quand même,
derrière nous.
Envie d'Irlande, d’Écosse à
nouveau, de Canada, de Japon, de Suède, d'Islande, d'Italie, de
Corse, de Grèce, de Marrakech, des États-Unis, de Nouvelle-Zélande,
d'Australie...
C'est la force d'un voyage, de donner
envie de voyager encore, en dépit de tes appréhensions ou de tes
peurs, pour mon cas prendre l'avion.
Se dépasser.
Devenir aigle ou corbeau.
J'ai perdu du poids. Les derniers repas
ne passaient pas bien. Des relents de vieux démons.
Mais ce que j'ai laissé, je vais le
retrouver, plus fort, encore, le transcender dans les pages et puis
j'ai hâte de voir la petite vidéo que j'ai fait de Beaghmore, de la
chaussée des Géants et de Corrimony.
Hâte de lire aussi pour mon jeu
fétiche le supplément sur l'Irlande.
Non pas que ça soit plus beau que
l’Écosse ou que le Canada, mais les gens, putain, les irlandais
sont communicatifs et sympas.
C'est à peine si j'entends la pluie
maintenant.
Les images de la croix celtique, du
trèfle que j'ai trouvé non loin, du vent balayant le grand lac
s'estompent, un peu comme si tout n'avait été qu'un rêve, un peu
comme si j'avais été vraiment embrassé par une fée à Beaghmore
et que j'étais maintenant dans un autre temps, dans un autre rêve...
J'ai fait une page du jour qui peut
prolonger cet écrit, pour une fois.
Normal. Nécessaire.
Je n'ai pas tout de suite, cela dit,
envie de retourner à la réalité, les paperasses pour le statut de
handicapé, le boulot, les examens, les arrêts maladies, voire se
faire arrêter un an...
J'ai envie de rester encore un peu
là-haut, dans les nuages que nous avons traversé Joseph et moi,
dans le cœur de l'orage, je viens d'apercevoir une lumière dans le
ciel, dans l'espace infini, libre et détache de toutes les
contraintes.
Les contraintes ?
Quelles contraintes.
Je sais qu'il est possible de vivre
avec juste celles que l'on se donne...
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